jeudi 21 février 2013

Bernard Arnault de Polytechnique à la Légion étrangère, en passant par la Belgique et la Thiérache

Bernard Arnault, LVMH, en route pour la Belgique, a accepté de poser avec le bicorne de Polytechnique pour le petit reporter de l'Ane Vert
 
Interview exclusive de Bernard Arnault par le petit reporter de l’Ane Vert à l’occasion de la visite de B.A. en Thiérache (LVMH Fragrance Brands à Vervins) le 20 janvier 2013.
 
LPR : Bernard Arnault, je voudrais tout d’abord vous remercier d’avoir accepté de porter le bicorne de l’Ecole Polytechnique pour notre photographe. Les images de vous à cette époque de votre passage à Polytechnique sont difficiles à trouver, est-ce une histoire difficile à porter pour quelqu’un qui est aujourd’hui le patron et le propriétaire d’un des plus grands groupes mondiaux de l’industrie du luxe ?


BA : Pas du tout, le temps où Polytechnique formait exclusivement des officiers supérieurs de l’Artillerie ou du Génie, des cadres pour l’industrie lourde, est passé. Ne boudons pas notre plaisir, nous vivons dans un monde largement pacifié où la légèreté n’est plus honteuse. Et puis j’ai frayé des voies nouvelles et je me réjouis de voir que Polytechnique forme aujourd’hui la fine fleur des cadres de haut niveau de l’industrie financière mondiale. Leurs innovations sur les modèles mathématiques de gestion des produits dérivés et l’optimisation fiscale bouleversent notre monde avec une efficacité que pourrait leur envier l’artillerie de feu la Grande Armée. Excusez moi pour cette litote quelque peu anachronique, elle me semble cependant aussi éclairante que le soleil d’Austerlitz.
Pour ce qui est de la propriété de LVMH, même si j’y pèse d’un bon poids, je voudrais vous faire remarquer que je ne suis que co-propriétaire ; j’ai des actionnaires extérieurs et mes enfants, par ailleurs, seront de plus en plus associés à la direction de l’entreprise.

 
LPR : Justement, à propos d’optimisation fiscale, le bruit à couru ici qu’à la suite de votre installation en Belgique il n’était pas impossible que l’usine de Vervins déménage dans la Thiérache belge et plus  précisément à Chimay, que pouvez vous dire à ce sujet à nos lecteurs thiérachiens ?


BA : Je dois dire que ça serait tentant, pour notre image de luxe, si Chimay était encore une principauté indépendante. Ce n’est plus vraiment le cas. Sauf découverte de gisements importants de gaz de schistes dans les parcs de leurs châteaux, les princes de Chimay ne sont plus que des princes d’opérette, pas mal de noblesse d’empire dans leur descendance, ce n’est pas très porteur en terme d’image. Donc nous n’avons pas de projets de ce genre dans nos cartons.  Mes enfants en jugeront peut-être différemment dans un avenir lointain, nul ne peut présumer des hasards des alliances dynastiques à venir, notamment si la Belgique finit par retourner à ses anciennes principautés, ce qui n’est pas tout à fait improbable. Les réflexions de mon confrère Arnaud Lagardère sur ce terrain me paraissent plus audacieuses que celles mes enfants, tout cela est à voir.

 
LPR :  Pour en rester aux mouvements qui s’observent depuis quelques mois sur la frontière belge, quelle réflexion vous inspire l’actualité de ce légionnaire d’origine belge qui vient de perdre la vie – donner sa vie serait plus exact - dans les combats du Nord-Mali et qui n’avait pas, lui, « fait Polytechnique » ni été biberonné aux valeurs et honneurs de la République ?
 

BA : (après un long silence)
« Comprenne qui voudra
Moi mon remords ce fut
Le malheureux qui resta
Sur le pavé
La victime raisonnable
Au gilet déchiré
Au regard d'enfant perdu
Découronné défiguré
Celui qui ressemble aux morts
Qui sont morts pour être aimés »
Votre question m’interpelle et me trouble au delà de ce que vous pouvez imaginer. Ne riez pas, je paraphrase ici une citation d’Eluard que le Président Pompidou osa dans ma jeunesse.
Quant aux flux de personnes qui s’observent sur la frontière belge votre question est bien pertinente. Les médias parlent trop des exilés fiscaux et pas assez de ces dizaines de milliers de belges qui viennent irriguer de leurs talents et de leur courage le pays de ma jeunesse. Cet oubli a une longue histoire, celle de nos flagorneries identitaires. Qui se souvient que Jules César écrivit que « de tous les peuples de la Gaule, les belges sont les plus braves » ? Qui se souvient que les grandes eaux de Versailles n’auraient jamais existé sans le talent des sidérurgistes liégeois qui construisirent la Machine de Marly ? Qui se souvient que le musicien le plus applaudi à Paris lors de la période révolutionnaire et de l’Empire fut le liégeois Grétry ?  Qui se souvient que les belges volontaires furent si nombreux dans les armées de la Révolution et de l’Empire ? Qui se souvient de Théroigne de Méricourt ? Et nos érudits savent-ils qu’ils ont ânonné leur grammaire française dans le grand ouvrage de Maurice Grévisse, natif du borinage ?
A l’inverse, après la révocation de l’Edit de Nantes les protestants français, des gens souvent bien éduqués et entreprenants, sont allés trouver refuge aux Pays-Bas et jusqu’en Prusse. Bruxelles fut aussi souvent le refuge des éxilés de toutes nos contre-révolutions. Les mouvements ont toujours existé dans les deux sens.


LPR : La différence avec le présent c’est peut-être que, pour les protestants, il s’agissait d’un exil forcé. Vous ne dites rien des contemporains ?

BA : Ils sont trop nombreux à investir leurs talents dans nos campagnes, nos industries, nos beaux arts, je craindrais d’en oublier beaucoup. Il faudrait aussi parler de tous les peuples nos voisins et de tous les outre-mers dont les concours ont été si importants tout au long de notre histoire, parler aussi en sens inverse de tous nos aventuriers et découvreurs au long-cours, c’est une trop longue histoire pour votre petit journal.

 
LPR : Un journaliste belge a récemment réalisé un long reportage sur les exilés fiscaux Outre-Quiévrain en notant que beaucoup se plaignent, pour leurs enfants ou petits enfants restés en France, de la mauvaise qualité de son système éducatif et de santé. Comme cela date un peu il a négligé de leur demander ce qu’ils pensaient du niveau de nos forces armées, n’y a-t-il pas là une forme d’inconséquence ?

BA : Je ne comprends pas votre question, voulez vous dire que seul celui qui paie est en droit de se plaindre ? Cela ferait beaucoup de silence dans les rangs car les pauvres qui  contribuent peu ne manquent pas et pèsent d’un poids électoral bien plus considérable que nos maigres bataillons de résistants fiscaux. Par ailleurs la Belgique autorise la double nationalité, les citoyens français de l’étranger seraient des citoyens de seconde zone privés de la liberté de leurs opinions ? Nos enfants devront-ils, comme ce malheureux sous-officier d’origine belge, s’engager dans la Légion étrangère pour recouvrer une citoyenneté de plein exercice ?
LPR : Ça ne semble pas d’actualité, même le Directoire et l’Empire n’en ont pas demandé tant aux enfants de la noblesse émigrée à leur retour, et ce en des temps autrement troublés où les périls étaient bien plus tranchants,. Mais n’apercevez vous pas que réduire ce soldat à un « malheureux » est faire peu de cas et de respect à son engagement ?

BA : Je vous l’accorde, c’était une facilité de langage, un lapsus peu digne d’une tête qui a porté bicorne. Je vais vous dire le fonds de ma pensée sur la chose militaire. Il me semble que nous ferions un bond en avant gigantesque vers un monde pacifié si toutes les armées du monde n’étaient autorisées à recruter que des hommes et des femmes ayant dépassé la soixantaine. Si les Nations Unies décrètent cela demain à l’unanimité par traité inviolable je vous jure que je m’engage illico dans la Légion étrangère.

LPR : Demanderez vous alors à être intégré dans le grade qui était le vôtre quand vous êtes sorti de Polytechnique ?

BA : C’est à réfléchir, je n’ai pas tout à fait perdu la main mais repartir à zéro pourrait me rajeunir. Ce n’est d’ailleurs sans doute pas la seule difficulté. Il y aura sans doute des contrevenants à cette loi internationale et il faudra peut-être une force de police internationale plus jeune dans son recrutement pour faire face à cette occurrence.

 
LPR : N’est-ce pas contradictoire ?

BA : Pas du tout, regardez les rues de Paris ou de Bruxelles : qui a le droit d’emprunter les sens interdits ? La police, les pompiers et les ambulances.

LPR : Et l’industrie du luxe ?

BA : C’est hors sujet !


                                                                         Fin de l'interview

Ppc : l’âne vert - mes lecteurs auront compris qu'il s'agit d'une fiction

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