mercredi 13 avril 2011

Cigognes et pipistrelles, font-elles le printemps ? Trois cigognes filmées autour d'un pigeonnier, à l'heure bleue, un soir d'avril



Ballade du soir à l’abbaye cistercienne de Bohéries à l’heure bleue. Trois cigognes volent autour du pigeonnier. L’une se pose au sommet de la lucarne. Les deux autres ne trouvent pas de perchoir et disparaissent derrière le pigeonnier. Les pipistrelles, qui sont les petites chauves-souris des zones humides, font un vol de reconnaissance. L’effraie des clochers, dont le pigeonnier est le nichoir, tente un vol d’intimidation.
Puis la cigogne s’envole et rejoint ses compagnes. Je n’ai pas vu de cigogne depuis que j’allais, gamin, en colo dans les Vosges et en Alsace, mais je l’ai tout de suite reconnue.
Film tourné le 11 avril 2011 (je donne cette précision pour les ornithologues statisticiens)

Les oiseaux migrateurs sont priés de ne pas oublier les deux évènements suivants :

Le PRINCE TRAVESTI de Marivaux le vendredi 15 avril (voir le billet précédent)

et, pour les oiseaux musiciens et néanmoins migrateurs :

Scène Ouverte à Etréaupont le samedi 16 avril :




dimanche 10 avril 2011

Un rendez vous à ne pas manquer : Marivaux à Fresnoy-le-Grand le vendredi 15 avril à 20h30 . Deux invitations gratuites offertes aux lecteurs de l'âne vert !


Le prince travesti
Comédie en 3 actes de Marivaux
Par la Compagnie La Bigarrure
A Fresnoy-le-Grand (au CASOC)
Le vendredi 15 avril à 20h30

« Une pièce où intrigues politiques et désirs amoureux se côtoient, rires et larmes alternent, raison d’Etat et arlequinades s’entremêlent. La plus romanesque et peut-être la plus contemporaine des pièces de Marivaux »

Enfin une nouvelle qui dément la plaisanterie favorite du tenancier du café-épicerie de mon village : "la culture ici c'est la bête rave". Humour de convenance et, un  peu, de désespoir, car je sais qu'il aspire à des nourritures terrestres et à des rêves moins frustes. Aussi quand la Compagnie La Bigarrure (une compagnie théâtrale professionnelle basée à  Rozoy-sur-Serre, il faut le faire !) m'a appelé pour me parler de cette représentation théâtrale à Fresnoy-le-Grand et me demander d'en parler sur le blog j’avoue que mon cœur de battre, un moment, s’est arrêté. Une programmation de cette qualité à Fresnoy vraiment bravo ! Cela m’a ramené à des souvenirs d’enfance. Je suis d’une génération qui a connu, dans les années de l’immédiat après guerre, les premiers et si magnifiques balbutiements de la « décentralisation théâtrale » portés par les mouvements d’éducation populaire issus de la résistance. Mes premiers contacts avec le théâtre, hors les pochades de patronage, datent d’une époque, au début des années 50, où j’étais collégien à Joinville, dans le vallage haut-marnais . Je n’oublierai jamais une pièce de Molière jouée pour nous par le Théâtre de Bourgogne, dans la salle du patro de cette petite ville. Il est difficile de faire comprendre aux générations d’aujourd’hui quelle bouffée d’oxygène et combien fut jubilatoire cette première levée du rideau rouge et ce qu’il nous ouvrit de portes vers l’imaginaire.  On idéalise trop aujourd’hui ces années dites des « trente glorieuses », la vie, notamment dans les internats des petites villes, y était morne et régie par des codes empruntés au répertoire d’un père fouettard ubuesque et souvent cruel : j’ai tôt compris dans ce contexte, et grâce à ces comédiens de la première « décentralisation », que le théâtre était un art de résistance.

La dernière fois que je vous ai recommandé un spectacle c’était il y a un an pour le film « le temps des grâces » à Vervins. Je me souviens encore qu’arrivé un peu en avance je fis connaissance avec le responsable du Cinéma qui était d’humeur fort maussade, une association de jeunes agriculteurs et l’ACAP avaient peiné à obtenir son adhésion au projet. « Je n’aurais jamais du accepter cette programmation – me dit-il - , je connais mon public, il n’y aura pas un chat, d’ailleurs je n’ai pas allumé le chauffage ». Une demi heure après la salle était comble et le chauffage assuré par le public.

J’espère pour les comédiens de La Bigarrure que ce genre de petit miracle se reproduira vendredi à Fresnoy-le-Grand et que d'autres que l'âne relaieront l'information (c'est ce qui avait fait le succès de la projection à Vervins). C’est une troupe qui ne manque pas d’ambitions puisqu’ils donneront ce spectacle (ou d’autres ?) à Avignon cet été. Avec le soutien, je l’imagine du Conseil Régional (je sais qu’Alain Reuter soutient la présence à Avignon du théâtre picard).

La Compagnie, qui lit l’âne vert à l’occasion, a eu la délicatesse d’offrir deux invitations gratuites aux deux premiers lecteurs du blog qui se manifesteront : réservez votre invitation en appelant Audrey Vasseur à La Bigarrure au 03 23 58 33 09
Et pour en savoir plus utilisez ce lien :

mercredi 6 avril 2011

La version pour sourds et mal entendants du discours de Nicolas Sarkozy à Nesle le 5 avril 2011. Ou il est question du canal Seine-Nord et du canal de la Sambre à l'Oise


Comme beaucoup d’entre vous, j’imagine, j’incline à la voie d’eau. On la dit avec raison plus écologique et respectueuse de l’environnement que les norias de camions sur l’autoroute du nord et je sais qu’une grande barge, comme il en circule sur la Seine ou les canaux à grand gabarit de la Belgique et des Pays-Bas, peut remplacer des centaines de camions. J’ai donc plutôt une sympathie spontanée pour le projet Seine-Nord qui vise à relier les réseaux à grand gabarit du bassin parisien et du sud de la Picardie(Oise aval, Seine) et ceux de l’Europe du Nord. Dans le même temps je me souviens que l’eau est rare dans la zone de partage des eaux, en Santerre et Vermandois, entre le bassin versant de la Somme et celui de l’Escaut. C’est une difficulté que les ingénieurs, au cours des siècles précédents, ont eu bien du mal à surmonter. Pour le canal de Saint-Quentin d’abord où ils ont du aller chercher l’eau du Noirrieu et de l’Oise à Vadencourt (Aisne), par une rigole souterraine de plusieurs dizaines de kilomètres. Ensuite pour le canal du Nord pour lequel il a fallu détourner une partie de l’eau de la Somme. Je me souviens aussi qu’un canal à grand gabarit, projeté au XIXème siècle entre Bordeaux et Sète (sur le modèle de Suez ou Panama), fut abandonné parce que les ingénieurs finirent par calculer que cette voie d’eau épuiserait la ressource en eau des bassins versants affluents. 

Donc j’aurais aimé que le projet Seine-Nord soit abondé par des études sérieuses et un débat contradictoire et citoyen sur ces questions de la ressource en eau qui impactera surtout la région Picardie alors même que c’est sur ce territoire que les retombées économiques prévisibles seront les plus faibles. Force est de constater que peu d’informations sont disponibles sur ce sujet et qu’un débat serein sur la question ne semble pas vraiment souhaité par les acteurs de ce dossier.

Ensuite il m’a toujours semblé que le financement d’un tel projet devait être proportionné à l’impact économique attendu. La voie d’eau est un mode de transport qui supporte mal les ruptures et transferts de charge, il est donc fort probable que les retombées économiques seront surtout à Dunkerque, Anvers et Rotterdam au Nord (de façon plus douteuse en Rhénanie) et au Sud à Gennevilliers (port de Paris), Conflans-Sainte-Honorine, Rouen et Le Havre. Les retombées en terme d’emploi qu’on nous fait miroiter en Picardie risquent fort de se révéler aussi illusoires que celles du feu de paille que fut le projet de « Port sec » à Couvron près de Laon (port « très sec » puisque n’existait à proximité ni voie d’eau ni voie ferrée électrifiée). La Picardie peut sans doute espérer la création d’une ou deux plateformes intermodales à proximité de ce canal, le transfert sur voie d’eau d’une partie de ses exportations de blé et des produits de ses industries agro-alimentaires vers les grands ports du sud ou du nord ; sans doute aussi le transfert d’une partie des produits de carrières et de sablières (et sans doute leur multiplication) au sud de l’Oise. Quelques dizaines de milliers de containers à destination de la région ou de la Champagne transiteront-ils par ces plateformes ? Ce n’est pas impossible, mais sans doute au prix d’une saturation en gros cubes logistiques (déjà bien avancée) de la basse vallée de l’Oise.

Ce contexte inclinait à espérer que la région Picarde, plutôt que de participer au financement d’une telle infrastructure, serait fondée à réclamer des études d’impact environnementales sérieuses et, si la chose s’avérait faisable, …des compensations économiques importantes. Par exemple une remise à niveau, par l’Etat, des infrastructures en déshérence de l’est de la région (canal de la Sambre à l’Oise fermé depuis plus de cinq ans par défaut d’entretien des ouvrages d’art par VNF, Nationale 2 (l’ancienne Paris-Bruxelles) qui dans certains de ses tronçons n’est même plus au niveau d’une médiocre départementale, ligne ferroviaire Paris-Maubeuge par Saint-Quentin désormais fermée au trafic voyageur au delà de Maubeuge vers la Wallonie, et où les dessertes restantes sont de plus en plus précaires et menacées (la desserte, par exemple du musée Matisse au Cateau).

Le discours du Président de la République hier à Nesle, et les documents produits à cette occasion, mettent en évidence qu’on est à des années lumières de cette perspective ! Loin d’obtenir des compensations la région picarde s’engage sur ce projet à hauteur de 80 millions d’Euros (j’ignore à quoi se sont engagés les départements de la Somme et de l’Oise) pour le bénéfice bien étroit d’un strapontin à une association public-privé (on ne sait pas encore qui sera choisi des groupes Bouygues ou Vinci) où, comme il est d’usage, on peut pronostiquer une privatisation des bénéfices et une régionalisation-étatisation des pertes. D’autant que ces deux opérateurs étant actifs dans le BTP ils vont être « juges et parties » pour l’exécution des travaux et ce serait miracle qu’une telle conjoncture produise une modération des coûts.

Je note enfin que Monsieur Borloo et Madame Kosciusko-Morizet ont totalement négligé de nous donner, hier, des nouvelles du calendrier de travaux résultant des préconisations du rapport Verdeau commandité il y a deux ans par leur ministère et resté sans suite apparente malgré ses conclusions favorables à la réouverture du canal de la Sambre à l’Oise. Le Président Gewerc qui m’avait dit il y 18 mois, alors que je faisais signer avec un certain succès des pétitions pour le canal de l’Oise et de la Sambre, dans un de ses meetings à Saint-Quentin : « j’ai dit dans le bureau du Ministre que  nous ne débloquerions pas d’argent pour Seine-Nord si l’Etat ne faisait pas son devoir pour le canal de la Sambre à l’Oise », semblait avoir oublié cette promesse. A-t-il obtenu des garanties sur ce point avant de faire voter les crédits pour Seine-Nord ? Si c’est non je dois bien convenir qu’il a menti , et si c’est oui, pourquoi n’en parle-t-il pas publiquement ?

Pour conclure je remarque que le Président de la République n’a pas craint hier d’abuser devant son auditoire d’une rhétorique usée jusqu’à la corde: « vous êtes, a-t-il dit en substance, au cœur de l’Europe, au carrefour prometteur d’un formidable rail entre l’Europe du Nord et l’Europe du Sud ». Lecteur attentif, depuis des années, des travaux des géographes-aménageurs j’ai remarqué que c’est un argument qui a été tellement survendu à des milliers de maires et de Présidents de collectivités par les plus rentables des bureaux d’étude (ça ne coûtait pas cher  à produire) qu’il est aujourd’hui assez largement démonétisé et que les élus prêts à payer au prix forts de tels argumentaires se font bien rares. Exception faite des nostalgiques des discours du maire de Champignac et d’Achile Talon. Dans le registre de la BD c’est une rhétorique que, personnellement, je ne boude pas. Mais les politiques avisés savent, comme le disait Bonaparte, qu’on peut tout faire avec une métaphore, sauf s’asseoir dessus ! (Que ne s’en est-il souvenu plus tard !)

Vous pouvez aussi, pour plus d'information, lire ou relire mes textes précédents sur le canal de la Sambre à l'Oise (en cliquant sur "canal" dans le pavé de mots clés à droite en haut de cette page). L'association Canal Set, dont j'ai donné les coordonnées dans un de ces billets, milite activement en Thiérache et dans le bassin de la Sambre, sur ces questions.