vendredi 28 mai 2010

Célébration du fromage de Maroilles , le film de l'âne vert


Une version basse résolution, pour ceux qui ont une connexion internet lente, est visible sur la page où est reproduit le texte de l'homélie (voir le lien à la fin de cet article)

Prédicateur souvent facétieux et truculent, Maurice Lelong o.p., originaire d'Estrées, au nord de Saint-Quentin, a donné dans son homélie sur le Maroilles, une page d'anthologie : sans doute le plus beau texte littéraire sur le fromage de Maroilles. Prononcée et radiodiffusée en 1961, dans le cadre des festivités du millénaire du fromage de Maroilles, cette homélie savante et souriante eut, en son temps, un succès mérité. La bande son de ce film est un enregistrement sur disque (Soder) que réalisa Maurice Lelong pour accompagner la sortie de la "Célébration du Fromage" chez son éditeur Robert Morel en 1961 (maquette d'Odette Ducarre). Cette "Célébration" comportait un texte inédit et le texte complet de l'homélie prononcée quelques mois plus tôt à Maroilles.
Auteur prolifique, Maurice Lelong obtiendra l'année suivante le prix de l'humour noir pour sa "Célébration de l'art militaire" chez le même éditeur. On peut se reporter, sur ce blog, aux billets que j'ai publiés sur ses "célébrations" de l'âne, de l'oeuf, de l'andouille (d'autres viendront).

Le texte complet de l'homélie est disponible sur ce blog. Il vous suffira, au bas de la colonne de droite de ce blog, à la rubrique "Documents", de cliquer sur le lien "Celebration Maroilles", je vous conseille de faire un copier coller dans votre traitement de texte car le texte est assez long et mérite d'être imprimé. Vous pourrez ensuite revenir au blog en cliquant sur l'imagette de l'âne vert.

Pour le film je remercie Odette Ducarre, Jacques Métille, le RP Kim-en-Joong o.p. et l'association des Amis de Robert Morel qui m'ont prêté leur concours et une partie des documents qui figurent dans le film.
Remerciement spécial aussi à Claire Halleux et à ses collaborateurs (trices) qui, à la ferme de la Fontaine d'Orion, à Haution, Thiérache de l'Aisne, fabriquent, à mon goût, le meilleur et plus onctueux Maroilles que je connaisse. (cette information n'est pas sponsorisée !)

lundi 24 mai 2010

Frère des sept moines cisterciens de Tibhirine (s'écrit aussi Tibéhirine)

Mémorial aux 7 moines de Tibhirine au monastère cistercien de Notre-Dame de l'Atlas
(merci à b. Laurent pour cette photo)
Bien sûr, j'ai pensé plus particulièrement à eux aujourd'hui à cause du film de Xavier Beauvois, "Des hommes et des dieux", qui a raté de si peu, semble-t-il, aujourd'hui, la palme d'or à Cannes. Film que je n'ai pas vu bien entendu, je n'étais pas à Cannes et il sortira seulement sur les écrans en septembre, mais dont j'ai lu les critiques élogieuses, comme vous tous sans doute, dans la presse de la semaine écoulée.

Comment expliquer au public, sans doute largement incrédule, de ce blog que je vis depuis 1996 très souvent en communion avec les belles figures de paix de ces sept moines cisterciens ?
Ceux qui me connaissent savent que je vis aujourd'hui sur un lieu cistercien mais une histoire d'adolescence bien singulière me rattache bien plus profondément au courage, à la modestie, au silence, à l'abnégation de soi, à la foi respectueuse de l'autre, des sept moines de Tibhirine. Dans les dernières années, si violentes aux vivants, de la première guerre d'Algérie, l'adolescent que j'étais, élève dans le technique et voué à une mobilisation sans sursis, était déterminé à échapper à cette guerre absurde et cruelle. Passer le bac comme candidat libre ouvrait la voie d'un sursis, c'était une voie de ruse plutôt modeste, je pouvais aussi me déclarer objecteur ou déserter, ce qui impliquait la prison et un prix à payer élevé, je n'en avais sans doute pas tout à fait le courage et cette détermination m'isolait dans mon milieu familial et scolaire. Je réussis à passer le premier bac comme candidat libre l'année même qui clôturait mes études techniques. Ensuite j'entrepris de passer le deuxième bac (philo, c'était assez culotté pour quelqu'un qui avait passé le 1er bac technique) en suivant des cours par correspondance tout en travaillant. A quatre mois du bac je me trouvai en grande difficulté dans mon travail de pion dont je dus démissionner. Les moines de l'abbaye de Cîteaux, mis au courant par un ami de mes projets et de mes difficultés, me donnèrent alors asile à l'hôtellerie de l'abbaye où je pus préparer dans la sérénité ce bac que je réussis.

L'espace de liberté qu'ils me donnèrent fût magnifique et sans contrepartie : le père portier veillait sur mon confort, j'étais libre d'assister aux offices à ma convenance, j'avais accès au jardin et à la ferme de l'abbaye où je croisais, dans le respect de leur silence, les moines de la communauté affairés au travaux des champs et du jardin. Au réfectoire de l'hôtellerie où je prenais mes repas, le plus souvent seul, un petit haut-parleur me reliait au réfectoire des moines où l'un deux lisait, "recto-tono", un livre pour les frères assemblés. J'ai toujours dans ma bibliothèque le livre que la communauté "lisait" ainsi durant les quelques mois de mon séjour : "L'Empire des steppes" de René Grousset. C'est un livre remarquable sur l'histoire des civilisations nomades d'Asie Centrale (Attila, Gengis-Khan, Tamerlan),  travail d'historien au demeurant fort éloigné des clichés sur les "huns" du manuel d'histoire Mallet-Isaac de mon enfance. Choix de lecture à bien des égards surprenant dans une abbaye cistercienne mais qui témoigne que la curiosité et le respect de l'autre de Tibhirine étaient déjà bien ancrés dans le silence de la vie cistercienne de cette époque. 

De ces années m'est resté, moi qui suis si éloigné d'être un croyant exemplaire comme de prétendre à la sainteté, fut-elle minuscule, une fidélité inexpugnable, à un article du credo de mon enfance : la foi en la communion des saints. Je ne dirai rien aujourd'hui des autres articles de ce "credo" qui ressortissent pour moi des mystères de la vie et du secret des cœurs.. Je vous donne simplement à écouter (la voix y est plus importante que l'image), en attendant le film de Xavier Beauvois, un petit film sur Tibhirine trouvé sur la toile.

mercredi 19 mai 2010

A Vervins, le rhino, c'est rosse !

 Dessin d'Yves Chaland - Faire la fête au rhinocéros ?
Nuit des musées à Vervins, le week-end passé. Et une bonne surprise car ce petit musée, qui était quelque peu à l'abandon lors de mes dernières visites, s'est enrichi de pièces remarquables sur l'histoire de la ville et elles sont données à voir de manière assez  savante et agréable. Un objet m'a cependant intrigué, il ne faisait pas encore tout à fait nuit, dans la cour de ce musée : un rhinocéros ! Est-ce que, comme les abeilles, ces animaux en  seraient réduits à se réfugier dans les villes pour échapper à leurs prédateurs ? En fait c'est une statue à l'abandon au fond de la cour, un rhinocéros monumental dans le style Tinguely (un artiste que j'aime), la vélocité en moins. Pas de socle, pas de notice, elle est en déshérence dans un carré d'herbes folles. Au moins, se dit-on, ce rhinocéros ne mourra pas de faim ! Mais il commence à rouiller, ce n'est pas très grave car l'artiste n'a pas utilisé des matériaux de première jeunesse et ce qui relève de la patine ou de l'état original est difficile à déterminer.
Un informateur, dont je tairai le nom (je protège toujours mes sources), me dit que la bonne ville de Vervins a acquis cette œuvre pour la somme bien modique, compte tenu du poids de la chose, de 6 000 Euros, et qu'elle semble, depuis lors, s'en désintéresser.
Rhinocéros - oeuvre d'un artiste inconnu dans la cour du Musée de Vervins
Alors je risque une supplique à la municipalité de Vervins : je suis prêt à accueillir de façon temporaire et contractuelle cette oeuvre en dépôt dans mon jardin, je la mettrai sur une socle, je rédigerai une notice sur l'artiste qui l'a réalisée, et créerai autour d'elle une petite placette que j'aménagerai pour l'occasion pour l'agrément de mes amis et de mes visiteurs. Cette placette je la baptiserai "Place des vieux chinois lubriques", pour rappeler à chacun le tribut que l'animal paie (enfin ce qu'il en reste en Afrique) aux forfanteries libidineuses de cette population qui, dit-on, use et abuse de la poudre de corne de rhinocéros.

Une alternative plus pédagogique serait que la ville de Vervins baptise elle même une telle place (le grand rond point sud de la ville n'a pas vraiment de nom par exemple) et y installe le rhinocéros en son centre. Pour que le résultat soit probant, en terme de développement durable, il serait souhaitable que la ville de Vervins se "jumelle" ensuite avec une grande ville chinoise.
Post scriptum : s'il s'agit d'un rhinocéros "sans papiers" et que la discrétion de sa présence à Vervins est une ruse pour tenter de le faire échapper aux épigones de Mr Besson, je retire immédiatement ce billet de mon blog, donc merci de m'en avertir le cas échéant !

lundi 17 mai 2010

Choses vues aux alentours du Familistère Godin à Guise (Aisne)

Aujourd'hui à Guise, aux portes même du projet Utopia, et jusque dans le périmètre de l'ancien Familistère de Jean-Baptiste André Godin (pavillon Landrecies), prospèrent les marchands de sommeil tandis que la déshérence s'étend au coeur même de la ville ancienne. Peut-on produire du sens, sur un projet de lieu de mémoire ambitieux sur l'oeuvre de Godin, lui qui fonda sa réflexion sur cette misère ouvrière et urbaine de son temps, sans règler ce problème ?  C'est la question que je pose depuis plusieurs années, à l'occasion des inaugurations et festivités qui se tiennent au Familistère, aux politiques qui ont la bonté de m'écouter. Invariablement il m'est répondu "on s'en occupe". Mais comme les choses perdurent j'entends de plus en plus ce "on s'en occupe" sur le ton de "circule, y rien à voir". Et bien aujourd'hui à travers ce reportage photo, il y a à voir ! Et il y a à voir ce que les journaux, les guides et les discours officiels négligent le plus souvent de nous montrer. Oser regarder la vérité du présent, c'est peut-être le début de la solution, c'est mon espoir en mettant en ligne ce reportage.

Sur la bande son vous pouvez entendre la voix de Michel Bouquet disant un texte de Victor Hugo, "Choses vues". C'est un extrait d'un double CD édité par la Bibliothèque sonore, Ed Frémeaux&associés.
 Dans "Etudes sociales n°5" Godin écrivait ceci : "La question de l'habitation ouvrière est depuis longtemps à l'examen. Mais, jusqu'ici, on s'est en est occupé beaucoup moins au point de vue du bien être et de l'amélioration du sort de l'ouvrier, qu'au point de vue des avantages qui devaient en ressortir pour les capitaux engagés dans ces sortes d'entreprises.... La parcimonie dans l'étude des plans a été la conséquence de ces considérations : l'idée préconçue d'un revenu direct et immédiat de ces maisons d'ouvriers, excluait un but social...Les préjugés s'entassent à l'envi pour faire de la maison ouvrière le contraire de ce qu'elle doit être; tout est calculé pour construire des quartiers refuges de misère et de pauvreté..". Voila, il écrivait ça il y a plus d'un siècle (bientôt 1-1/2), c'est toujours d'actualité et les bailleurs sociaux comme les marchands de sommeil se donnent la main pour que ça dure encore un bon moment.
Ajout hiver 2011 : un éminent famillistèrien, Monsieur Patte, m'a signalé récemment une erreur sur le montage audiovisuel. Les photos du Familistère Landrecies qui sont dans le reportage ne représentent pas ce bâtiment (qui ne semble pas aux mains de marchands de sommeil bien qu'il soit assez dégradé) mais un bâtiment qui lui ressemble et qui est un peu plus haut dans la même rue, pratiquement en face de l'usine Godin. Monsieur Patte me dit que les famillistériens appelaient ce bâtiment "Le familistère Gallet". Est-ce par anti-phrase ou faisait-il partie d'un périmètre tardif du Familistère ? Monsieur Patte m'a confirmé qu'il est bien aux mains d'un marchand de sommeil.
Par ailleurs les choses semblent bouger à Guise. Est-ce le résultat de l'audience de ce reportage ? Il semble que le Vieux moulin que l'on voit aussi dans le reportage a été récemment acheté par la ville de Guise pour être démoli. 
Au printemps prochain je ferai le point sur ce blog sur la question des marchands de sommeil et de l'habitat dégradé à Guise

jeudi 13 mai 2010

Une date à retenir : 1er juin projection du film "Le Temps des grâces" de Dominique Marchais à Vervins

J'ai parlé de ce film il y a quelques semaines sur ce blog, ne ratez pas ce ciné-débat : le mardi 1° juin 2010 au cinéma de VERVINS à 20h, autour du film documentaire « le temps des grâces » organisée par le CMR de l'Aisne (Chrétiens dans le monde rural). A la suite de la projection, le débat sera animé par Lucien BOURGEOIS (Ancien Directeur du service Economie de l’APCA). 
Vous pouvez lire (ou relire) ce que j'en ai dit en cliquant sur  : 
et 

mardi 11 mai 2010

10 mai 1940 Début de l'offensive allemande, le grand historien Marc Bloch est à Bohain-en-Vermandois, dans l'Aisne

Portrait de Marc Bloch, photo prise sans doute dans les dernières années de sa vie.
(il est fusillé à Lyon le 16 juin 1944 à la veille de la libération, il alors 58 ans)

La Picardie, le département de l'Aisne et la ville de Bohain s'honoreraient* de se souvenir de la grande et belle figure d'un des historiens les plus éminents du siècle passé, Marc Bloch (1886-1944). Au moment du déclenchement de l'offensive allemande, il y a 70 ans, le 10 mai 1940, il est à l'Etat-Major de la 1ère armée française qui, depuis l'automne 39, est "logé" à l'école de filles de Bohain-en-Vermandois.

C'est un engagé volontaire, il n'était pas mobilisable compte tenu de son âge, 53 ans, à la déclaration de guerre. Il a déjà fait toute la guerre de 14-18 dont il est sorti capitaine après avoir été cité 4 fois à l'ordre de l'armée et reçu la Croix de guerre.

Marc Bloch, photo non datée. Le numéro qui figure sur son képi
est celui du régiment d'infanterie où il a combattu en 14-18
Il a été affecté à la direction du service des carburants de l'armée la plus mécanisée du front, celle qui doit entrer en Belgique dès que les troupes allemandes y pénétreront. Curieuse affectation pour un intellectuel qui avait espéré être affecté comme officier de renseignement et de liaison avec l'armée anglaise ! La bureaucratie militaire signe, dans cette affectation, l'aveu des prolégomènes du désastre qui va suivre. Il remplit cependant avec compétence et minutie cette tâche d'organisation logistique si vitale pour une armée mécanisée vouée au mouvement. Son zèle et sa compétence seront cependant peu utiles à cette 1ère armée qui va être très vite prise au piège de l’encerclement dans la poche de Dunkerque d’où Marc Bloch parvient à s’embarquer, in extremis, pour l’Angleterre, pour retour immédiat au front via Cherbourg.

Aux armées comme dans le civil il est un intellectuel républicain passionnément engagé dans son époque « l’histoire – dira-t-il – se nourrit des questions du présent ». A Bohain où il a passé l’essentiel de la « drôle de guerre », il résiste à l’atmosphère émolliente de l’attente et d’une petite société d’Etat-Major où la compétence et la motivation ne surabondent pas, en mettant en jeu les qualités d’observation et d’analyse qu’il a développées dans son métier d’historien : « un historien –dit-il, en parlant de cette période – ne s’ennuie jamais ».

Il tirera de cette expérience, dès l’été 40, un texte qui est sans doute le diagnostic le plus pertinent des causes de la défaite. Sous le titre « L’étrange défaite » le livre ne sera publié qu’à la libération car il ne souhaitait pas le voir édité dans une France occupée. Dans ce livre il ne se contente pas d’analyser les causes militaires du désastre de 40, inadaptation de la stratégie, lenteur d’une bureaucratie militaire imbue de suffisance, incompétence du commandement, il réfléchit aussi et surtout aux faiblesses de la société française qui a produit cette machine de guerre inadaptée. Sur beaucoup de points son diagnostic reste d’ailleurs terriblement d’actualité. Ses développements sur le mode de cooptation et de sélection de nos « élites dirigeantes », sur les faiblesses et les valeurs de notre système éducatif, pourraient encore aujourd’hui inspirer des programmes audacieux de réforme.

Au moment de l’entrée en guerre il est sans doute l’historien médiéviste le plus remarquable de sa génération même si la Sorbonne, où ses origines « israélites » et sa pensée novatrice ne lui font pas que des amis, a tardé à promouvoir ses mérites.  En 1929 il a fondé, avec Lucien Febvre, la revue Les Annales d’histoire économique et sociale. C’est l’acte fondateur d’une école dite « des Annales » qui va renouveler profondément la recherche historique française et l’ouvrir au grand large du monde : l’histoire s’ouvre à l’anthropologie en s’intéressant aux mentalités,  à la sociologie en prenant en compte le jeu des acteurs sociaux,  à l’économie en interrogeant les cycles et ruptures de la vie économique,  à la dynamique spatiale des échanges et des assujettissements… pour dire bref, à une pratique interdisciplinaire de l’histoire. Cette école des Annales va devenir la filiation intellectuelle des historiens les plus remarquables de la génération suivante : Fernand Braudel (qui a beaucoup compté dans ma propre formation), Georges Duby, Jacques Le Goff, Le Roy Ladurie, en seront, parmi beaucoup d’autres. Elle donnera à la recherche historique française un prestige intellectuel de premier plan.

Marc Bloch est aussi une figure remarquable de la résistance au nazisme. En juin, déguisé en civil, il parvient à échapper à la capture et à rejoindre la « zone libre ». En octobre 40, il est déchu de son métier d’enseignant-chercheur par les premières lois antijuives de Vichy. Par exception « pour services exceptionnels rendus à la science » cette déchéance sera par la suite annulée par une mesure d’exception qui concerne une dizaine d’universitaires. Il enseigne alors à Clermont-Ferrand et à Montpellier tout en organisant pour « Combat » les premiers réseaux résistants du Languedoc. Il plonge ensuite dans la clandestinité avec le groupe « Francs tireurs » dans la région lyonnaise. Il est arrêté et torturé par la Gestapo à la prison de Montluc au printemps 44. Il est tiré de la prison pour être fusillé le 16 juin 1944 à quelques semaines de la libération qu’il sait proche. Il a ces mots de réconfort pour un très jeune homme qui fait partie du groupe promis au peloton d’exécution et qui pleure: « ils vont nous fusiller, n’aie pas peur, ils ne nous feront pas mal. Cela ira vite ».  
En épigraphe à « L’étrange défaite » il avait écrit cette citation du Polyeucte :
     « je ne hais point la vie et j’en aime l’image.
      Mais sans attachement qui sente l’esclavage »


* Depuis lors, la ville de Bohain a accepté la mise en place, à l'entrée de l'ancienne école de filles, rue Marcelin Berthelot, un panneau qui rappelle ce séjour de Marc Bloch

Conseils de lectures :
« L’étrange défaite » de Marc Bloch, collection folio-histoire
«L’histoire, la guerre, la résistance » par Marc Bloch (regroupe une bonne partie de ses écrits)
Collection Quarto – Ed Gallimard


En ce jour du 10 mai, et à 70 ans de distance, je pense aussi à mon père qui était, simple soldat, engagé volontaire lui aussi (il avait été réformé en 34 pour constitution fragile), et qui était sur le front près de Longwy, sur la frontière luxembourgeoise, ce jour là.  Il servait dans le 25 ème GRCA, un groupement de reconnaissance mobile assez fortement motorisé (c’était une innovation car la mobilité était alors rare dans l’armée française).

Cette unité devait s’opposer, en entrant au Luxembourg, à l’avance allemande, tandis que le gros des troupes restait à l’abri de la ligne Maginot. L’armée allemande pour protéger la course Est-Ouest de ses divisions blindées vers Sedan, leur opposa des troupes aguerries, nombreuses et lourdement armées et le 25 ème GRCA, unité légère, dut, au bout de trois jours de combat et en essuyant de lourdes pertes, se replier derrière la ligne Maginot.

Ce groupement sera ensuite envoyé sur le front de la Somme, de l’Aisne et de l’Oise et il fut à l’avant garde des combats lors de l’ultime offensive allemande dans le triangle Roye-Chauny-Pont-Sainte-Maxence où il sera décimé en couvrant la retraite du gros des troupes. Les survivants, dont mon père, parviendront à échapper à l’encerclement et à franchir la Loire. Mon père m’a laissé un journal de sa campagne de France, je le publierai peut-être, au fil des jours, sur ce blog.

dimanche 9 mai 2010

La nuit sécuritaire, capitalisme et fétichisme : écoutez la belle voix de Jean Oury

Parmi les visages, les voix, les mots fondateurs, croisés quelques instants ou quelques années et qui vous accompagnent ensuite toute une vie, la voix de Jean Oury (psychiatre et fondateur avec Tosquelles du courant de la psychothérapie institutionnelle) est pour moi de premier plan. Je pense à lui, à ce qu'il m'a fait comprendre des combats nécessaires, chaque fois que prennent le dessus dans l'actualité comme au plus quotidien, la stigmatisation sécuritaire de la maladie mentale et des "classes dangereuses", le fétichisme des "business plans" et du veau d'or, la chose publique réduite à la fabrication de parapluies toujours plus criards et mortellement revanchards. Alors j'ai déjà parlé de lui brièvement sur ce blog à propos du climat de notre assemblée régionale, c'était bien léger, mais peu vous importe, à vous lecteurs de ce blog, le cheminement intime et politique de cette rencontre. "Je est un autre" disait Rimbaud, et même tous les autres dans la joie et la douleur. Une des ambitions de ce blog est de faire entendre, à qui voudra, les voix que j'ai aimées, celle là est bien vivante, écoutez là si ça vous chante. Si vous voulez ensuite en savoir plus sur Jean Oury, vous trouverez une bonne approche sur Wikipédia.



Si le sujet vous a interessé quelques pistes de lecture :

Histoire De La Borde, Dix Ans De Psychothérapie Institutionnelle à La Clinique De Cour-Cheverny
 Ed. Recherches (Revue) - 1976  Auteur collectif, dessins de Francis Bérezné (c'est sans doute épuisé mais on le trouve facilement d'occasion sur internet)

A QUELLE HEURE PASSE LE TRAIN…Conversation sur la folie.
Jean Oury et Marie Depussé 
Calmann-Lévy, 2003

Dieu Gît Dans Les Détails - La Borde, Un Asile 
Marie Depussé
P.O.L.  1998

vendredi 7 mai 2010

François Eberlé, final du concert du 1er mai à Sains-Richaumont : la Taverne de Jacques (hommage) à Boué

La première fois que j'ai rencontré François Eberlé il marchait sur les traces de Robert-Louis Stevenson dans la vallée de l'Oise et venait vérifier que j'étais bien le sonneur des cloches que Stevenson avait entendues en 1876 durant son voyage en canoë sur la Sambre et l'Oise. Il fut dépité d'apprendre que le hameau où j'habite etant privé de cloches depuis la révolution, je ne pouvais être ce carillonneur... Cette histoire m'ayant beaucoup rajeuni nous sommes devenus amis.
J'étais à son concert du 1er mai où il a chanté à Sains-Richaumont en compagnie de Marie (voix et violoncelle) et Thomas Eberlé (voix et guitare), avec, au violon, Renaud Marin. J'ai filmé pour vous le final de ce concert une chanson où François rend hommage à Jacques qui a tenu longtemps une taverne à Boué où aimaient à se retrouver beaucoup de musiciens et où j'ai, personnellement découvert de jeunes musiciens écossais eux aussi inspirés par Robert-Louis Stevenson.



J'ajoute que François a été l'inventeur d'un éphémère festival Stevenson en Thiérache qui fut l'occasion d'échanges fort sympathiques avec l'Ecosse des musiciens et des sociétés savantes stevensonienes. La récupération institutionnelle de ces impulsions n'a jusqu'à ce jour accouché que de souriceaux, et de toute façon, l'idée elle même est en grande partie hypothéquée par la déshérence où a été laissé depuis plus de 4 ans le canal de la Sambre à l'Oise (fermé pour non entretien des ouvrages, voir mes contributions précédentes sur le sujet). Cependant la nouvelle se répand tout le long des vallées de la Sambre et de l'Oise que de petits groupes de passionnés et de bénévoles travaillent à des projets locaux où le voyage et le livre, si remarquable, de Stevenson sont remis en mémoire pour impulser des énergies nouvelles. Du côté du canal il se dit aussi qu'un déblocage serait à l'ordre du jour : l'absence de communication des autorités sur le sujet fait que la vigilance des riverains comme des amis de Stevenson reste d'actualité.

PROCHAIN CONCERT de François Eberlé : Lille   Le Biplan  à 22h
le 28 mai 2010
Entrée: 5,5 euros
(voir aussi son site que j'ajoute en lien sur ce blog)

lundi 3 mai 2010

Festivités du 1er mai 2010 au Familistère de Guise : l'actualité de Jean-Baptiste-André Godin par Jean-Pierre Balligand (extrait du discours inaugural des festivités)

Aujourd'hui je serai bref, je suis en déplacement en Belgique pour soutenir le moral de ceux, de tous les bords, qui détestent les barbelés aux frontières linguistiques. Avant de partir j'ai eu le temps de filmer Jean-Pierre Balligand aux festivités du 1er mai au Familistère de Guise. Je vous livre le meilleur de son discours inaugural, le moment où il parle de l'actualité de l'œuvre de Jean-Baptiste André Godin, écoutez le.

Il y a quelques jours j'avais écrit une petite contribution du même tonneau (ah Dieu que tonnelier est un beau métier! Quand j'étais gosse et qu'il tonnait dans le ciel, les soirs d'orage, ma grand-mère disait "c'est le bon dieu qui remue ses tonneaux") sur le blog d'Emmanuel Mousset où je me risque parfois à écrire... Je vous reparlerai du Familistère quand je rentrerai de Belgique. Pour l'heure en pensant à la Grèce à ce qu'elle nous a apporté (l'idée de l'Europe et de la Démocratie, ce n'est pas rien), j'ai très mal à l'Europe et j'ai été plutôt heureux que Balligand rappelle ces choses et d'où vient le mal en ce 1er mai 2010.